10/06/2015
L'avenir des relations entre la Grande-Bretagne et l'Union européenne
Editorial
Le 7 mai 2015, les Britanniques ont procédé à l’élection des 650 députés composant la Chambre des Communes. A la faveur de ce scrutin, M. David Cameron a obtenu 331 sièges, soit plus que la majorité absolue fixée à 326.
Ces résultats ont dans l’ensemble surpris nombre d’observateurs qui, sur la base de sondages, pronostiquaient un coude à coude avec le Labour (parti travailliste), sous-estimant sans doute la possibilité de faire un pronostic fiable dans le cadre d’une part, d’un mode de scrutin majoritaire uninominal à un tour et, d’autre part, dans le contexte actuel de la Grande-Bretagne. Ce contexte se caractérisant par l’apparition d’un pluralisme d’un genre nouveau lié à la montée en puissance de forces centrifuges, c’est le cas notamment des indépendantistes écossais, et des europhobes de l’UKIP ainsi que de la frange la plus extrémiste du parti conservateur.
Bien que minoritaire en voix, c’est le propre de ce mode de scrutin, ce dernier parti détient donc une représentation lui permettant de gouverner sans être obligé de faire une coalition avec une autre force politique.
Pour autant, au-delà d’une majorité apparemment cohérente et homogène, un seul parti exerçant le pouvoir, il est permis de s’interroger sur les conséquences de ces élections non seulement quant à l’avenir de la Grande-Bretagne mais aussi quant à l’avenir de la Grande-Bretagne au sein même de l’Union européenne.
Des interrogations demeurent, à cet égard, quant aux intentions réelles du gouvernement britannique dans sa volonté de quitter ou non l’Union. Certes, tout en confirmant à plusieurs reprises, et en dernier lieu le 27 mai dernier, son intention de provoquer un référendum sur le maintien ou non de son pays dans l’Union, le Premier ministre britannique a souvent assuré qu’il ferait campagne pour son maintien dans l’Union s’il réussissait à négocier une réforme du fonctionnement de celle-ci.
Trois électeurs britanniques sur quatre approuvent la promesse du Premier ministre d’organiser un tel référendum, même si le choix du corps électoral semble encore incertain. A l’évidence, il apparaît que les conservateurs, hier europhiles, paraissent être davantage eurosceptiques voire franchement europhobes.
M. Cameron a hélas sans doute contribué à cette regrettable évolution du fait de ses surenchères et excès tendant à endiguer la montée en puissance de l’UKIP de M. Nigel Farage. Ainsi, l’accent a-t-il été souvent mis sur les aspects négatifs et non sur les avantages résultant de l’appartenance à l’Union. Il en est hélas souvent de même dans nombre d’autres pays de l’Union y compris et surtout en France.
Ce faisant, c’est la thèse des plus fervents adversaires de la construction européenne qui progresse un peu partout au sein de l’Union européenne. D’autres élections, en Grèce, en Finlande, en Pologne, en France, en Italie, mais on pourrait poursuivre la liste, traduisent la montée en puissance de forts courants populistes, xénophobes et eurosceptiques.
S’agissant de la Grande-Bretagne, on relèvera un paradoxe. En effet, face à la volonté de nombre de Britanniques de quitter l’Union européenne on observe en revanche que les Ecossais, s’ils manifestent de fortes velléités de s’émanciper du Royaume-Uni, entendent pour leur part demeurer au sein de l’Union au même titre d’ailleurs que les milieux d’affaires de la City.
Il est permis aujourd’hui de s’interroger et à certains égards de s’inquiéter sur ce que d’aucuns qualifient désormais de « Brexit » (sortie de la Grande-Bretagne de l’Union européenne). Les Britanniques et les autres membres de l’Union européenne doivent prendre l’exacte mesure des conséquences que pourrait engendrer un tel départ et l’effet d’entraînement qu’il pourrait exercer. Il serait dramatique de détricoter la construction européenne, opération complexe mais salutaire. Aussi, sans doute faut-il saisir l’opportunité de la phase annoncée de négociations entre la Grande-Bretagne et ses partenaires pour refonder un projet crédible autour d’une Europe à deux vitesses dont l’idée souvent défendue ici même semble désormais recueillir l’assentiment de plus en plus d’artisans et de partisans de la construction européenne.
En tout état de cause, il convient de s’attacher à ne rien faire qui puisse opposer davantage la Grande-Bretagne au reste de l’Union, même s’il faut mettre l’accent sur le respect de règles communes. Le destin de la Grande-Bretagne est dans l’Union, dans une Union rénovée et non à l’extérieur.
Gérard-David Desrameaux
13:49 Publié dans Editoriaux | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : grande-bretagne, brexit, europe à deux vitesses, rce, gérard-david desrameaux, union européenne, référendum, cameron
28/04/2015
"Le ministérialisme", cette maladie infantile
Le « ministérialisme », dans sa forme moderne, cette maladie infantile de ceux qui concourent au discrédit de la politique se répand à une vitesse incroyable dans notre pays.
« Faut-il ou non entrer au gouvernement ? » Telle paraît être la question « existentielle » que semblent se poser quelques élus qui ne représentent souvent qu’eux-mêmes.
Ces élus – ils se reconnaîtront aisément – jouent un jeu particulièrement dangereux. Ont-ils conscience qu’ils donnent de la politique la pire image qui soit, celle d’une comédie qui pourrait évoluer vers une mauvaise farce avant de sombrer dans une tragédie ?
Il est évident que la pression exercée par certains, impliquant une inflexion de la politique, conduirait à donner l’impression, si elle était suivie d’effet, de revenir aux méthodes et comportements les plus décriés à juste titre de feu la IVe République.
Ce n’est pas ainsi que l’on réconciliera les Français avec la politique à un moment où celle-ci est dénoncée, au demeurant plus que de raison.
Les petites luttes intestines, les débauchages individuels de quelques seconds couteaux en mal de notoriété, les jeux stériles d’appareils souvent déconnectés du monde réel et au sein desquels les règles élémentaires de la démocratie prônées à l’extérieur sont souvent méconnues, donnent de la politique une représentation politicienne qui nuit à l’essence même du politique.
Oui, assurément, le « ministérialisme » dans son acception contemporaine est bien un danger pour la démocratie, un cancer pour la politique.
Gérard-David Desrameaux
13:05 Publié dans Editoriaux | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : ministérialisme, danger pour la démocratie, cancer pour la politique, discrédit de la politique, desrameaux
26/04/2015
Le projet "Europa"mériterait d'être mieux défendu
Editorial
L’Europe se déchire. L’Europe unie, ce grand projet voulu et mis en œuvre par les pères fondateurs de l’Europe, est chaque jour un peu plus décriée, critiquée et vilipendée, comme je l’ai souvent indiqué, par nombre de dirigeants qui ont failli à leur mission.
Ces derniers n’ont pas su ou voulu, en effet, préserver l’héritage transmis par ceux qui ayant connu les affres de la guerre et ayant été confrontés aux totalitarismes et autoritarismes du XXe siècle avaient décidé de faire œuvre de paix en bâtissant une Europe unie sur les décombres résultant de la seconde guerre mondiale.
L’ancien président de la République, M. Valéry Giscard d’Estaing, dans un ouvrage intitulé Europa la dernière chance de l’Europe, publié il y a quelques mois, indiquait : « Si on ne propose pas à l’opinion publique des objectifs concrets et réalistes d’intégration européenne, il existe un risque sérieux d’assister à la dislocation du dispositif existant. »
De son côté, l’ex chancelier allemand, M. Helmut Schmidt, dans la préface de l’ouvrage précité indiquait : « l’attentisme et l’immobilisme sont de mauvaises réponses devant l’imminence de la désintégration. »
Depuis des années, j’ai suffisamment appelé de mes vœux que les plus éminents europhiles puissent lancer un appel solennel en vue d’une refondation du projet européen (voir notamment sur ce site mon éditorial du 19 mai 2014) pour ne pas rendre aujourd’hui hommage à ces deux hommes d’Etat qui ont, il y a quelques mois, mis les Européens devant leurs responsabilités tout en mettant l’accent sur l’urgence qu’il y avait désormais à agir si l’on ne voulait pas voir le projet européen échouer.
Le projet « Europa » du président Valéry Giscard d’Estaing a le mérite d’exister. Sans doute, eu égard aux circonstances actuelles et à l’état présent de l’Europe, ce projet n’est-il pas aussi ambitieux que ce que les plus ardents défenseurs du projet européen étaient en droit d’espérer. Il se veut cependant pragmatique, sérieux et susceptible de favoriser cette refondation à partir de quelques Etats d’une Europe plus intégrée.
Il est permis, en revanche, de s’interroger là encore sur le peu d’écho enregistré à la suite d’une telle proposition.
Pourquoi tant de silence, pourquoi cette absence de réaction de la part de ceux qui pourraient en raison même de leurs fonctions et de leur rôle en appeler à un sursaut, à une initiative ?
Pourquoi cette absence de mobilisation, cette forme d’impuissance et d’acceptation fataliste d’un avenir peu glorieux pour le projet européen hier encensé et présenté comme l’avenir incontournable des peuples d’Europe ?
L’ « euroscepticisme » grandit. Il compte désormais dans ses rangs, non seulement les eurosceptiques de la première heure, c’est-à-dire ceux qui ne croyaient pas en ce projet mais aussi des europhiles qui voulant le voir aboutir doutent aujourd'hui de la capacité et surtout de la volonté de nombre d’acteurs politiques européens de premier plan d’emprunter les voies qui le lui permettent.
Ce sont maintenant les « europhobes » qui font entendre leurs voix en haussant le ton, profitant des peurs et des angoisses des habitants d’Europe.
Qui relèvera le défi au nom des Européens de cœur et de raison ?
Oui, le projet « Europa » mériterait d’être mieux défendu car à ce jour il constitue la seule piste crédible, piste qui devrait servir de base de discussion en vue d’une relance du projet européen.
Gérard-David Desrameaux
22:44 Publié dans Editoriaux | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : europa, europe unie, valéry giscard d'estaing, chancelier schmidt, refondation projet européen, euroscepticismr, europhobie, desrameaux