Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

18/06/2014

A PROPOS DES ELECTIONS EUROPEENNES (suite)

 

Depuis des décennies, hélas, les élections européennes, élections atypiques pour différentes raisons déjà indiquées et répertoriées, se déroulent dans une relative indifférence, voire désormais dans un climat de franche hostilité de la part des différents protagonistes, peuples, gouvernants, politiques et médias, tous confondus.

Aux eurosceptiques, s’ajoutent maintenant des europhobes qui voulant détruire le projet européen  viennent de faire leur entrée au sein du Parlement européen afin d’accélérer leur travail de sape.

Je ferai part prochainement des réflexions que m’inspirent les dernières élections européennes, mais une fois de plus, il ne me paraît pas totalement inutile de revenir sur certaines réflexions antérieures portant sur les élections européennes précédentes afin que le lecteur prenne bien conscience que les problèmes d’aujourd’hui étaient déjà tout à fait identifiables et que c’est faute d’avoir tenté de trouver les solutions et de prendre les initiatives qui s’imposaient que nous nous trouvons aujourd’hui dans une situation de méfiance, voire de rejet, du projet européen par un grand nombre d’électeurs.

 

C’est la raison pour laquelle, je reproduis ci-dessous deux éditoriaux publiés sur ce site en 2009, extraits de mon dernier livre publié en février dernier : Pour une Europe souveraine, Ecrits et plaidoyers :

 

«   A PROPOS DES ELECTIONS EUROPEENNES

 

1er février 2009

 

A l’approche des élections européennes de juin 2009, l’auteur regrette que les acteurs politiques manquent d’ambition pour l’Europe ainsi que d’imagination en se taisant sur le type d’Europe qu’ils souhaitent : Europe de libre-échange, Europe simple zone économique ou Europe puissance.

 

Les  prochaines élections européennes, nous le savons se dérouleront au mois de juin prochain.

Depuis 2004, cette élection s’effectue selon un mode de scrutin de listes à la proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel, en un seul tour et ce, dans le cadre de huit grandes circonscriptions.

Avant 2004 l’élection se faisait à partir d’une liste nationale. Mais nous savons tous que l’idée de scinder la liste nationale en huit listes régionales avait évidemment, pour ceux qui ont conçu ce remodelage, l’avantage de réduire l’impact d’un éventuel succès d’une force politique dont le leader* affichait de fortes convictions européennes et tentait de s’affranchir du carcan majoritaire et bien évidemment de rendre plus difficile un tel succès.

 Pour des forces politiques, il est moins aisé, en effet, d’obtenir des élus dans le cadre de circonscriptions réduites que dans le cadre d’une seule circonscription nationale car il y a beaucoup plus de pertes.

Donc, il faut avoir à l’esprit que la prochaine bataille sera difficile.

Elle le sera d’autant plus que les listes, une fois encore, seront nombreuses et que les discours tenus, les projets proposés, ne seront pas toujours d’une grande lisibilité.

En effet, depuis quelques années toutes les forces politiques, y compris les moins favorables au projet de construction européenne, se présentent comme pro-européennes, à l’exception bien entendu des souverainistes de toujours et des nationalistes convaincus.

Mais au-delà du mot Europe, encore faut-il savoir ce que ce terme signifie dans l’esprit de ceux qui le prononcent.

Il peut recouvrir, en effet, beaucoup de choses et si l’on n’y prend garde c’est le concept même d’Europe qui peut se dissoudre dans un pseudo-consensus.

Je m’explique: Il nous faut donner du sens à l’Europe.

 Il faut définir un projet qui soit susceptible de sensibiliser les peuples de notre continent et de les mobiliser.

Pour atteindre un tel objectif, il y a lieu de répondre, me semble-t-il, à leurs interrogations.

Celles-ci sont de plusieurs ordres : L’Europe pour quoi faire ? Quelle Europe voulons-nous ? Quel projet pour l’Europe ? Europe puissance, Europe zone de libre échange, Europe zone d’influence ?  L’Europe jusqu’où et avec qui ?

Et c’est le problème des élargissements et des frontières qui est ici sous-jacent.

Est-ce qu'il y a place pour une Europe à plusieurs vitesses ?  Quid d’une Europe à géométrie variable, quid  des coopérations renforcées,   quid de la théorie des trois cercles ? Quel sens donnons-nous aux mots « Europe Unie » ?

Voulons-nous une Europe, simple zone économique, voire culturelle, une zone d’influence mais ouverte, c’est-à-dire sans frontières délimitées et sans l’émergence d’une citoyenneté européenne, ou au contraire, puisque  c’est là le corollaire de la citoyenneté, la montée d’une Europe puissance, c’est-à-dire dotée des prérogatives d’une puissance fédérale, souveraine et capable de compter sur la scène du monde, impliquant notamment une vision commune du monde, des intérêts géostratégiques et géopolitiques convergents, une défense commune et une politique étrangère concertée, voire sur les sujets les plus fondamentaux, commune elle aussi ?

L’Europe, au départ, c’est six Etats.

C’est une communauté de six pays situés à l’Ouest de l’Europe et qui décident de s’unir avec des objectifs précis, à la fois ambitieux et limités, ambitieux car il s’agit d’une union, d’une intégration mais limités à des secteurs précis.

Aujourd’hui, nous sommes 27** et, il faut le reconnaître, nous avons en élargissant pris un risque immense, celui de diluer un projet.

Ce qui est possible ou était possible à six l’est-il encore à 27 ? Demain à 30 ou 40 ?

L’Europe est un peu à la croisée des chemins et nous devrions réfléchir à d’autres schémas qui pourraient redynamiser le projet des Européens de cœur et de raison que nous sommes : Union intégrée ?Union fédération ?Union confédération ? qui pourraient correspondre, mais pas nécessairement, aux premier, deuxième et troisième cercles ?

Pourquoi ne pas envisager à terme une construction qui emprunterait à ces trois schémas ?

C’est une piste, c’est une idée, ce n’est peut être pas la solution, mais elle devrait être examinée car il faut inventer  demain et faire preuve d’audace en sortant des sentiers battus.

En guise de conclusion, je voudrais dire que selon moi, la question ne se pose pas pour nous, démocrates, républicains et européens convaincus, de savoir si nous sommes favorables ou non à la construction de l’Europe, nous le sommes par définition, mais de savoir si nous entendons ou non être le fer de lance et les hérauts d’un projet politique audacieux, fort et cohérent, permettant de faire en sorte que l’on ne puisse plus dire demain que l’Europe est un géant économique mais un nain politique.

Je ne doute pas du sens de la réponse que nous serons à même d’apporter.

Puissions-nous garder le cap sur la question européenne en un temps où des discours convenus, pour ne pas dire critiques, sont tenus non seulement par les adversaires de toujours de la construction européenne mais par certains partisans d’hier.

Autant la critique, pour aller plus loin, pour aller vers plus d’Europe, me paraît non seulement souhaitable, mais nécessaire. Autant la critique, pour vider le concept d’Europe de toute substance, voire pour le condamner, me paraît injuste, voire suicidaire.

 

  • Il s’agissait de François Bayrou
  • Désormais 28

 

 

« L’AVENIR DE L’EUROPE

 

6 juin 2009 

 

L’auteur prend acte du fait que la campagne électorale menée à l’occasion des élections européennes des 4 et 7 juin 2009 n’a pas permis aux citoyens de l’Union de débattre des véritables enjeux relatifs à l’avenir de l’Europe, les partis politiques ayant globalement privilégié des thèmes de pure politique politicienne, faisant ainsi abstraction des questions de fond. Le vrai débat sur l’avenir européen ayant ainsi été occulté alors même que les peuples d’Europe étaient conviés à s’exprimer, il y a lieu désormais d’engager le débat nécessaire, mais celui-ci aura-t-il vraiment lieu ?

 

 

Le vrai débat sur l'avenir de l'Europe débutera au soir de l'élection du 7 juin 2009.

Je m’explique :

L’Europe a été trop souvent absente du débat politique engagé à l’occasion des élections européennes et ce, en France comme à l’étranger. Le phénomène n’est hélas pas nouveau et j’ai déjà eu l’occasion de le dénoncer en maintes occasions dans le passé, notamment en 2004 et en 1999.

Une fois de plus, des considérations trop souvent politiciennes et purement partisanes ont été omniprésentes durant cette campagne.

Une fois de plus, les repères sont brouillés et le flou artistique a dominé cette période.

Le plus petit dénominateur commun a été retenu chez les partisans de toujours de la construction européenne qui ont préféré opter pour un profil bas.

Sans doute fallait-il ne pas heurter les partisans du non au référendum et effaroucher les eurosceptiques !

Dès lors, le discours est devenu lisse, sinon inaudible, car les différences entre les uns et les autres s’estompaient et cessaient d’apparaître au grand jour, les uns et les autres invoquant l’Europe sans préciser de quelle Europe il s’agissait.

C’est ainsi que l’on parla d’Europe plus sociale, c’est assurément souhaitable, mais on ne dira rien sur les moyens et méthodes pour y parvenir !

C’est ainsi également que  l’on parla d’Europe plus respectueuse de l’environnement et là encore c’est infiniment souhaitable, mais on ne dira rien  non plus sur la manière d’atteindre cet objectif !

C’est ainsi encore que l’on parla de plan européen pour sauver l’économie de l’ensemble des pays qui appartiennent à l’Union mais cela ressemble presque à des vœux pieux dès lors que l’on ne dit rien sur la nature de l’Europe que l’on veut construire : Europe puissance d’essence fédérale ou simple zone économique et commerciale,  sur son identité ou sur ses identités, sur ses frontières et donc ses limites, sur ses valeurs et le message que  cette Europe doit porter sur la scène du monde.

 Bientôt viendra l’heure des bilans et il faudra alors s’engager fermement.

J’ai toujours dit que l’Europe, la construction de l’Europe était un grand dessein. Plus que jamais, il lui faut des avocats et d’ardents défenseurs animés par une passion commune : faire naître dans le cœur des peuples d’Europe un sentiment d’appartenance à une communauté de destin et promis à un avenir commun.

 Mais il va falloir que les authentiques Européens apprennent à débattre avec sérieux et sérénité loin des vaines polémiques et des petites phrases assassines car la grande ambition d’une Europe puissance, c’est-à-dire dotée des prérogatives de la souveraineté,  ne pourra se concrétiser si les calculs des uns s’ajoutent aux arrière-pensées des autres.

 Il ne faut pas assassiner cette grande idée : donner le jour à une puissance nouvelle qui sera capable de tenir sa place et son rang sur la scène du monde face aux autres grandes puissances qui demain s’exprimeront et régiront l’avenir du monde y compris le nôtre, nous peuples d’Europe, si nous ne sommes pas en mesure de taire nos divisions et de surmonter nos réticences.

C’est désormais à chaque citoyen d’Europe qu’il incombe de s’exprimer et d’œuvrer au renforcement des pouvoirs du Parlement européen pour que celui-ci puisse chaque jour davantage exprimer la volonté des peuples d’Europe et ce faisant, faire vivre une authentique démocratie européenne.

Plus que jamais nous devons œuvrer à l’affirmation d’une Europe puissance d’essence fédérale qui pourrait être le « noyau dur », l’avant-garde si l’on préfère, d’une Union européenne profondément repensée.

Mais il va falloir faire œuvre pédagogique et ne pas se tromper d’adversaires.

Aux citoyens d’Europe, j’ai envie de dire ce soir : Prenez votre destin en mains et exigez des institutions européennes qui soient en mesure de prendre en considération  vos aspirations.

Viendra bientôt l’heure où, j’en suis persuadé, le projet européen passionnera les électeurs de tous nos pays. Cette heure viendra dès que les citoyens de l’Union auront pris conscience de leur pouvoir et les hommes politiques de leur devoir face à l’Histoire. »

Les années ont passé. Nous sommes en 2014. Les mêmes causes ont produit les mêmes effets. Les Européens de coeur et de  raison vont-ils enfin prendre conscience de leur responsabilité devant l'histoire et s'engager avec plus d'ardeur et de détermination ? Nous l'espérons, je l'espère, même si je ne suis pas loin de partager l'idée exprimée à plusieurs reprises par un europhile convaincu et de talent, Jean-Louis Bourlanges, à travers cette formule percutante : "L'Europe a à sa tête des hommes qui ne croient pas à l'Europe."

Gérard-David Desrameaux