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02/12/2019

L'Europe et l'OTAN face à la montée des périls

Editorial

 

Partout, à travers l’Europe, se développent des forces politiques qui agitent des peurs et prônent des replis identitaires. Partout, une vision claire et positive de l’avenir de notre continent peine à se dégager.

Grande puissance économique et commerciale, l’Union européenne balbutie toujours sur le plan de la politique étrangère et de la défense. Nous le savions depuis longtemps mais nous pouvions légitimement espérer une prise de conscience quant à la nécessité de changer la donne et d’inverser le cours des choses. Or, il n’en est rien.

Le monde change, bouge dangereusement et l’Europe paraît comme tétanisée et impuissante à prendre l’exacte mesure de la gravité de la situation et de la montée des périls.

L’OTAN, de son côté, connaît assurément une crise majeure. Est-il, en effet, concevable, acceptable, admissible que la deuxième armée de cette organisation en termes d’effectifs, l’armée turque, pour la nommer expressément, puisse agir comme elle vient de le faire récemment en Syrie à l’encontre des Kurdes qui furent nos alliés dans la guerre contre Daech ?

Est-il acceptable que le même pays achète un système de défense anti-missiles S400 à la Russie tout en demeurant membre de l’OTAN ?

Est-il possible que les dirigeants de ce pays fassent pression comme ils le font sur des peuples appartenant à la même alliance en les menaçant et en les couvrant d’invectives ?

Oui, assurément, l’OTAN, à supposer qu’elle ne soit pas tout à fait en état de mort cérébrale, la formule est peut être un peu excessive, semble atteinte dans sa substance alors même qu’elle fête cette année ses soixante-dix ans.

Il ne faut pas s’en réjouir. Elle a été incontestablement un facteur d’équilibre, au temps de la guerre froide, notamment, mais force aujourd’hui est de constater qu’il faut au minimum redéfinir son cadre, ses missions et revoir sa composition.

Quid, dans le même temps des opinions et jugements émis par les dirigeants des principaux Etats membres de l’OTAN  à l’égard de cette organisation? Le président Trump n’a-t-il pas parlé d’organisation obsolète en évoquant cette structure il y a déjà quelques mois, alors même que la chancelière Angela Merkel dénonce pour sa part les mots drastiques et les propos intempestifs du président Macron ? La présidente de la Commission européenne ne vient-elle pas également de son côté de prendre ses distances avec les propos du Président de la République ?

Pourquoi, les Européens, demeurent-ils aussi réservés à l’égard du projet d’Europe de la défense souhaitée par le Chef de l’Etat qui serait de nature à rendre plus crédible le concept même d’une Europe souveraine lui permettant d’être davantage maîtresse de son destin ?

Ceux qui croyaient, qui croient encore, qui croiront toujours en l’affirmation d’une Europe puissance ne peuvent aujourd’hui que faire ce terrible constat : l’absence de l’Europe sur la scène politique mondiale est quelque chose d’affligeant et montre les limites de l’action des femmes et des hommes responsables qui avaient à cœur de prendre la défense d’un grand projet.

On ne peut se satisfaire d’une telle situation. L’absence d’une Europe politique avec tout ce que cela implique affaiblit chacune des nations composant l’UE et outre le fait qu’elle annihile notre ambition de jouer un rôle moteur dans le règlement des conflits mondiaux, elle nous met gravement en situation de faiblesse par rapport à des puissances secondaires mais qui ne connaissent que le langage de la force et de l’invective.

 

Gérard-David Desrameaux

 

26/02/2019

L'état de l'Europe à la veille d'échéances décisives

Editorial

 

L’Europe affiche une division dramatique face à la montée en puissance des nationalistes qui rêvent de détricoter le projet européen. Aussi, est-il difficile d’aborder avec sérénité l’échéance des prochaines élections européennes qui se profilent à l’horizon.

Comment ne pas s’inquiéter, en effet, une fois de plus, devant le triste spectacle qui s’offre à nous, à savoir celui de constater que les formations politiques sont toujours incapables de désigner de grandes voix européennes susceptibles de fixer un cap et de réveiller des consciences assoupies ?

Seules, celles qui entendent faire le procès de l’Europe semblent vouloir hausser le ton et prêtes à croiser le fer.

Une fois de plus, le rendez-vous incarné par le scrutin du mois de mai prochain ne doit pas se caractériser par des batailles politiciennes sans envergure et sans perspective.

En revanche, il est indispensable de proposer aux peuples d’Europe un projet d’avenir, un plan, une vision de l’Europe qui puisse galvaniser les énergies et montrer en quoi un projet européen crédible est une absolue nécessité.

Pour arriver à un tel résultat, sans doute, faut-il prendre davantage en compte les aspirations de nos peuples et entendre leurs voix, si ce n’est leur voix.

Les angoisses sont grandes et les inquiétudes sont légion chez nombre de citoyens d’Europe face à des lendemains qui ne sont pas toujours réjouissants compte tenu de l’état du monde, de ses divisions et de ses crispations pour ne pas dire plus.

Or, à force de ne pas entendre les appels des peuples d’Europe à plus de sécurité, plus de considération, plus d’estime, ceux-ci sont trop souvent tentés de répondre aux sirènes des populistes et des démagogues qui surfant sur les peurs et craintes souvent légitimes de leurs concitoyens entonnent les vieux refrains des nationalistes de toujours.

Ce faisant, ces derniers attisent les haines, désignent l’autre, l’étranger, celui d’en face comme l’ennemi, le responsable de leurs échecs et sèment peu à peu les graines de la discorde et de la désunion.

Dans la perspective des élections européennes, le Chef de l’Etat semble moins enclin à s’en tenir au seul duel entre progressistes et nationalistes et semble désormais davantage vouloir pourfendre une Europe devenue « trop ultra-libérale ».

La distinction antérieure entre nationalistes et progressistes était indiscutablement trop binaire et faisait fi des nuances diverses et variées qui composent l’échiquier politique européen et il est particulièrement sain de le reconnaître et de l’admettre.

Le débat doit être clair et loyal et permettre de dessiner l’esquisse d’un projet européen à la mesure des espérances des peuples d’Europe qui doivent avoir la force de caractère de contenir et peut-être de réduire les poussées identitaires et populistes qui font le jeu des forces hostiles à l’émergence d’une grande puissance sur la scène du monde : l’Europe.

Gérard-David Desrameaux

 

Gérard-David Desrameaux

10/06/2018

Les Européens face à leur responsabilité

Editorial

La dynamique européenne créée à l’occasion de la dernière élection présidentielle française et incarnée par Emmanuel Macron est largement entamée.

Les espoirs nés à ce moment-là sont désormais moins grands car les poussées populistes dans l’ensemble de l’Europe sont lourdes de sens et constituent des avertissements sévères pour les peuples de l’Union.

Les élections européennes approchent. Le temps presse.

On ne pourra endiguer la marche inexorable de l’extrême droite et du populisme fondée sur le « dégagisme » et le rejet des partis classiques ou tout simplement sur le rejet des partis ayant participé récemment au pouvoir si les forces politiques, les femmes et les hommes politiques sont incapables d’appréhender demain, en faisant abstraction des légitimes inquiétudes des peuples d’Europe.

Le rejet actuel des pouvoirs en place s’explique en grande partie par l’impression ressentie par les peuples de l’Union que celle-ci, à l’instar des gouvernants de chaque Etat en faisant partie, n’est pas en mesure de leur proposer un projet ayant du sens et de définir des priorités de nature à les rassurer sur leur avenir et sur leur sécurité.

L’Europe a besoin de plus de souffle. Nous le disons depuis des années, voire des décennies, et nous n’avons ici, dans ces colonnes, jamais cessé d’affirmer que nous devions oeuvrer pour l’émergence d’une Europe puissance, d’une Europe souveraine* capable de mieux appréhender les aspirations des citoyens d’Europe et plus particulièrement de ceux qui ont vocation à faire partie de cet ensemble plus intégré,soit au niveau des pays fondateurs, soit au niveau de la zone euro, sans pour autant exclure tout Etat qui souhaiterait en faire partie.

Il est urgent de mettre les Européens en face de leur responsabilité au regard de l’Histoire.

Pour aller de l’avant et afin de combattre l’esprit de défaitisme qui tend à inonder le ciel européen, il faut en appeler à un nouvel élan et inviter ceux qui sont prêts à dépasser la seule vision économique et commerciale du projet européen, à se mettre en marche sans mauvais jeu de mots.

Il s’agit de définir de nouvelles priorités tenant compte du contexte créé par la montée en puissance des populismes et de la détérioration de la situation internationale.

L’Europe, une fois encore, je tiens à le rappeler, ne peut se réduire à un espace, à un marché.

Il faut mettre l’accent sur la nécessité d’une souveraineté européenne partagée entre les peuples de l’Union qui sont prêts à franchir le pas.

Dans un monde de plus en plus dangereux et incertain, il faut se battre pour l’affirmation de nos valeurs et le respect de la civilisation européenne.

Pour couper l’herbe sous les pieds des nationalistes et des europhobes, il faut combattre avec autant de force les populismes d’extrême droite et d’extrême gauche ainsi que les xénophobes qui font écho à ceux qui font preuve d’un angélisme coupable en niant tout sentiment d’insécurité et en commettant un déni de réalité comme le dit Alain Finkielkraut.

Les peuples d’Europe se détournent de l’idée européenne et notamment de l’Union car ils ont souvent le sentiment de ne pas être assez défendus par les institutions européennes.

Ils se sentent d’autant plus en insécurité que les dirigeants européens ne semblent pas avoir une vision claire de l’avenir de l’Union européenne et qu’ils ont également le sentiment qu’on leur demande toujours plus d’efforts et que des politiques d’austérité, ou qui à tout le moins s’y apparentent, succèdent à d’autres politiques d’austérité sans que leurs efforts soient vraiment récompensés.

Sachons en tirer les conséquences avant qu’il ne soit trop tard !

Gérard-David Desrameaux

 

*Gérard-David Desrameaux, Pour une Europe souveraine, Ecrits et plaidoyers, Editions Lanore, coll. « Essais politiques », 2014.