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10/06/2018

Les Européens face à leur responsabilité

Editorial

La dynamique européenne créée à l’occasion de la dernière élection présidentielle française et incarnée par Emmanuel Macron est largement entamée.

Les espoirs nés à ce moment-là sont désormais moins grands car les poussées populistes dans l’ensemble de l’Europe sont lourdes de sens et constituent des avertissements sévères pour les peuples de l’Union.

Les élections européennes approchent. Le temps presse.

On ne pourra endiguer la marche inexorable de l’extrême droite et du populisme fondée sur le « dégagisme » et le rejet des partis classiques ou tout simplement sur le rejet des partis ayant participé récemment au pouvoir si les forces politiques, les femmes et les hommes politiques sont incapables d’appréhender demain, en faisant abstraction des légitimes inquiétudes des peuples d’Europe.

Le rejet actuel des pouvoirs en place s’explique en grande partie par l’impression ressentie par les peuples de l’Union que celle-ci, à l’instar des gouvernants de chaque Etat en faisant partie, n’est pas en mesure de leur proposer un projet ayant du sens et de définir des priorités de nature à les rassurer sur leur avenir et sur leur sécurité.

L’Europe a besoin de plus de souffle. Nous le disons depuis des années, voire des décennies, et nous n’avons ici, dans ces colonnes, jamais cessé d’affirmer que nous devions oeuvrer pour l’émergence d’une Europe puissance, d’une Europe souveraine* capable de mieux appréhender les aspirations des citoyens d’Europe et plus particulièrement de ceux qui ont vocation à faire partie de cet ensemble plus intégré,soit au niveau des pays fondateurs, soit au niveau de la zone euro, sans pour autant exclure tout Etat qui souhaiterait en faire partie.

Il est urgent de mettre les Européens en face de leur responsabilité au regard de l’Histoire.

Pour aller de l’avant et afin de combattre l’esprit de défaitisme qui tend à inonder le ciel européen, il faut en appeler à un nouvel élan et inviter ceux qui sont prêts à dépasser la seule vision économique et commerciale du projet européen, à se mettre en marche sans mauvais jeu de mots.

Il s’agit de définir de nouvelles priorités tenant compte du contexte créé par la montée en puissance des populismes et de la détérioration de la situation internationale.

L’Europe, une fois encore, je tiens à le rappeler, ne peut se réduire à un espace, à un marché.

Il faut mettre l’accent sur la nécessité d’une souveraineté européenne partagée entre les peuples de l’Union qui sont prêts à franchir le pas.

Dans un monde de plus en plus dangereux et incertain, il faut se battre pour l’affirmation de nos valeurs et le respect de la civilisation européenne.

Pour couper l’herbe sous les pieds des nationalistes et des europhobes, il faut combattre avec autant de force les populismes d’extrême droite et d’extrême gauche ainsi que les xénophobes qui font écho à ceux qui font preuve d’un angélisme coupable en niant tout sentiment d’insécurité et en commettant un déni de réalité comme le dit Alain Finkielkraut.

Les peuples d’Europe se détournent de l’idée européenne et notamment de l’Union car ils ont souvent le sentiment de ne pas être assez défendus par les institutions européennes.

Ils se sentent d’autant plus en insécurité que les dirigeants européens ne semblent pas avoir une vision claire de l’avenir de l’Union européenne et qu’ils ont également le sentiment qu’on leur demande toujours plus d’efforts et que des politiques d’austérité, ou qui à tout le moins s’y apparentent, succèdent à d’autres politiques d’austérité sans que leurs efforts soient vraiment récompensés.

Sachons en tirer les conséquences avant qu’il ne soit trop tard !

Gérard-David Desrameaux

 

*Gérard-David Desrameaux, Pour une Europe souveraine, Ecrits et plaidoyers, Editions Lanore, coll. « Essais politiques », 2014.